L’émission de Richard Gaitet en direct des Açores pour les 30 ans de radio Nova, c’est demain à 13 heures sur radio Nova (les fréquences) ou internet. En attendant l’antenne, son texte du jour sur son blog et ci-dessous. Bisous.
Dans ma chambrette battue par les vents, alors qu’il pleut des cordes sur Potager (traduction vraisemblable du nom de l’île) et que la nuit de mon trentième anniversaire tourne à l’orage, je m’apprête à découvrir, enfin, Pump Up The Volume [Allan Moyle, 1990], teen-comédie dans laquelle Christian Slater interprète « le disc-jockey subversif d’une radio pirate », héros gominé susceptible d’éveiller des vocations, surtout si vous jetez un œil au passeport de Reza Pounewatchy nouveau roi du Maroc.
C’est dire si je suis détendu après avoir découvert, ce matin, qu’il me manquait un câble pour relier
le micro à la table de mixage, après avoir pensé que ma vie serait plus simple si j’avais préféré les maths au français quand j’étais petit (cette idée me dégoûte), après n’avoir parcouru que 2712 kms, après avoir songé à la honte qui s’abattrait sur moi, telle la houle sur un voilier transatlantique, si j’échouais à transmettre une heure d’émission depuis l’Europe.
Ce stress, très mauvais pour les artères, c’était compter sans l’aide généreuse de vingt-deux pour cent du staff de l’antenne locale de RTP, Radio Televisao Portuguesa, que personne ici ne confond avec RTL.
Trois types gentils comme du pain d’épice (il ne vous aura pas échappé qu’il en manque un sur la photo), qui se sont pliés en quatre et grattés le museau pour comprendre comment diffuser de la musique sur le serveur alors que mon iPod ne répond plus. Trois enfants du pays, jeunes quinquagénaires, avec plus de vingt ans de maison dans les oreilles. Trois paisibles professionnels, qu’il convient de présenter comme le veut l’état-civil : Victor Pimentel, coordinateur de la délégation du personnel ; José Manuel Avila, technicien son ; Victor Alvernaz, technicien électronique ; je reproduis très fidèlement les intitulés de leurs postes, mais pour le premier, il faudrait dire : en fait, ce sosie sympa de Pascal Nègre, c’est le boss des quatorze employés du studio radio-télé d’Horta, qui assurent deux à trois reportages par jour insérés au gré des bourrasques dans les bulletins d’informations nationaux.
Cet après-midi-là, Victor, José et Victor sont inquiets pour de vrai, bien davantage que moi et mes soucis de mp3 : la télé retransmet en direct une audition à l’Assemblée nationale du président du groupe RTP, venu plaider contre la réduction de la moitié de son budget, prévue pour 2012. Le résultat des délibérations sera connu la semaine prochaine. Ce qui risque de compromettre ma carrière à la télé portugaise, malgré ce cliché prometteur pris sur le plateau de Bom Dia, leur talk-show quotidien.
Juste avant de quitter les bureaux, j’ai remarqué ce soleil dessiné sur le mur, et je n’ai pas pu m’empêcher de voir que les croutes de tapisserie défraîchie formaient tout autour une carte du monde, et que cet astre indiquait tout naturellement les Açores, et à la bonne hauteur en plus, exactement là où je remballais mon matériel, rayonnant d’avoir probablement réglé l’angoissante question de la technique.
Que raconterai-je vendredi ?
A vous les studios, silencio.