Mass Effect 3, victime de la nécessité de raconter la fin ?
Si un titre peut à lui seul contrer l’argument selon lequel « le boulot des jeux vidéo n’est pas de raconter des histoires », c’est bien la saga Action-RPG Mass Effect de BioWare. Gros engin narratif accro au storytelling sous toutes ses formes (le design et les décors « racontent » au même titre que les dialogues et le déroulement des missions), elle a dessiné au cours de ses deux premiers opus une gigantesque tapisserie galactique au principe d’évolution riche et complexe, peuplée de légendes ancestrales, d’enjeux mortels et de personnages poignants, chacun disposant d’une histoire personnelle aussi imaginative et inspirée qu’une nouvelle de Ray Bradbury. En comparaison, Star Wars fait figure de mémo…
On joue à Mass Effect autant pour la beauté cosmique des gunfights à la troisième personne et la gestion immersive des armes et autres skills que pour ressentir la trajectoire mélancolique du commandant Shepard et de ses compagnons d’arme. Mais alors que ME 1 & 2 se donnaient beaucoup d’espace pour tisser la toile de l’univers, toutes ces pistes aux étoiles filantes doivent parvenir à une conclusion dans la version 3. This is it : Les Reapers (race millénaire dont personne ne voulait accepter l’existence) ont débarqué, la galaxie est déchirée par la guerre, les planètes tombent, les personnages qu’on aime crèvent un par un… C’est la fin. Cela pose évidemment plusieurs problèmes. 1. Peut-on se sentir concerné si l’on n’a pas joué aux deux premiers ? 2. Est-ce un jeu à part entière ou le tiers d’un jeu ? et 3. S’il est mû par l’urgence de la destruction et la menace de l’apocalypse, comment conserver la structure lâche et open world des précédents épisodes ?… Autant de questions auxquelles EA et BioWare tentent de répondre dans leur langage marketing (« Ceci est le début, le milieu et la fin de la série », ont-ils communiqué. Une manière d’inviter les nouveaux joueurs à la fête) et à l’intérieur même du soft, en réduisant le champ des histoires (même les missions annexes nourrissent la trame principale) et la liberté de mouvement de Shepard sur la terre ferme. On est là pour rétablir la vérité : ceci n’est pas le début, ni le milieu, mais la fin, et même si le sentiment de tenir une galaxie entière dans le creux de sa main en prend un coup, Mass Effect 3 reste l’une des plus grandes expériences émotionnelles que le médium a à offrir. Un dernier hourrah pour la route.
Mass Effect 3 (BioWare / EA)