Hit&Miss dégaine Chloë Sevigny en tueuse à gages transsexuelle. Who’s your daddy?
« On n’a pas besoin de toi. Tu signes le formulaire pour l’assistante sociale, tu lui dis que tu t’occupes de nous et après tu dégages d’ici. » Ce n’est pas la première fois que le scénariste britannique Paul Abbott nous plante dans le salon d’une famille à problèmes. Dans Shameless (2011-2012), on assistait déjà à la démission parentale de Frank, paternel alcoolo, sympa mais irrécupérable, qui déléguait la gestion du quotidien à ses ados déchaînés. Dans Hit&Miss, Riley, Levi, Ryan et Leonie auraient eux aussi été livrés à eux-mêmes après la mort de leur mère (emportée par un cancer) s’ils n’attendaient pas dans une ferme de la campagne anglaise la venue du mystérieux père de Ryan, désigné comme leur nouveau tuteur. Mais c’est une brune en talons qui sonne à la porte : Mia est effectivement le père de Ryan, devenue transsexuelle. Et elle est aussi tueur à gages, pour le compte d’un criminel de Manchester.
Sous les traits androgynes de l’actrice et mannequin Chloë Sevigny, Mia, en survêt’ et capuche noire, manie les armes lourdes et élimine les gros chats du milieu en Faucheuse irréprochable. Le plus dur, c’est la vie civile, quand elle enfile son shorty et redessine son image de femme fatale. A la ferme, elle incarne la figure maternelle qui manque aux quatre orphelins. Riley, l’aînée de 16 ans, la rejette, empêtrée dans une relation secrète avec le propriétaire des lieux, une brute épaisse qui menace de les jeter à la rue sans préavis. Quand Mia relève les manches de son chemisier et met une raclée à ladite brute à coups de bottine, Riley ne sait plus si leur nouvelle maman va les sortir de la merde ou les y enfoncer jusqu’au col.
La cour des miraculés
Hit&Miss rappelle souvent Tideland (Terry Gilliam, 2005), notamment quand Leonie, la petite dernière, échappe à la surveillance du clan et se laisse entraîner par un rôdeur dans une cabane au fond des bois. Le danger qui plane autour de la tribu est permanent, incarné par un plat pays qui s’étend à perte de vue, à la fois terrain de jeu infini et symbole de leur isolement. Mais dans la maison, l’élément structurant, la vie domestique de ces canards boiteux va les lier au-delà de toutes proportions, jusqu’à la scène finale, quand l’univers criminel de Mia franchit le palier. Une réalisation froide, prenant le temps de révéler la profondeur des personnages dans les situations les plus sordides, fait songer au Tyrannosaur de Paddy Considine (2011). La production a démenti la possibilité d’une suite à ces six épisodes, mais on espère que l’histoire n’en restera pas là, quitte à engager un tueur.
Par Olivia Dehez
Hit&Miss
De Paul Abbott
Diffusion sur Canal+ à partir du 21 février, le jeudi vers 22h40