Gravity et All is Lost lancent une bouée au cinéma hollywoodien

Plus que des paris techniques, Gravity et All is Lost lancent une bouée au cinéma hollywoodien à la dérive.
all is lost film Chandor

All is lost

Secret de polichinelle : le cinéma américain traverse une drôle de passe. D’un côté il bat des records (4,76 milliards de dollars de recettes en juillet-août) de l’autre l’empire hollywoodien n’a jamais été économiquement aussi fragile, jusqu’à Steven Spielberg et Georges Lucas prophétisent un cataclysme proche. Et pour chapeauter tout ça, un consensus où tout le monde s’accorde à dire que les productions sont de plus en plus creuses, standardisées. L’ère du blockbuster roi serait-elle déjà sur le déclin ? On le saura peut-être lorsque la sanction du box-office sera tombée pour deux films atypiques.


Gravity et All is Lost se rejoignent à plus d’un titre, à commencer par leurs récits (une astronaute perdue dans la stratosphère tente de regagner une station orbitale/ un plaisancier devient naufragé après une collision entre son bateau et un container). Alfonso Cuaron et J.C. Chandor ont poussé l’art du pitch jusqu’à en faire la matière de situations dégraissées. Idem pour leurs castings se résumant peu ou prou à une star comme acteur unique – Robert Redford en mer, Sandra Bullock dans l’espace. Pas de digression possible, ni de temps mort, moins d’1h40 dans les deux cas pour survivre et pour accrocher le spectateur, ne le lâcher qu’au dénouement.

Renaissance et lâcher prise
All is Lost respecte un peu plus ce cahier des charges, ne filmant que Redford face aux éléments déchainés, Gravity se laisse aller à quelques artifices – une certaine surenchère dans l’épate, Clooney en guest-star, métaphore balourde sur la peur de l’abandon… – mais les deux surprennent par cette capacité à être du très grand spectacle et de belles histoires minimalistes, intimes. Chandor et Cuaron ont réussi à dompter l’armada technologique pour ramener littéralement le public au cœur des films qu’il est indispensable de voir sur d’immenses écrans, leur part physiquement immersive étant fondamentale.
Si l’on pourra rester de marbre face au sous-texte pataud de Gravity comme à l’ambiguïté du final d’All is Lost, comment ne pas applaudir ce double plaidoyer pour un cinéma reprenant le contrôle des outils techniques – il n’y a probablement pas un seul plan qui ne soit pas truqué – pour ne plus en faire une performance grandiloquente mais les mettre au service d’une dramaturgie ou d’un élément humain ? In fine, il est question, même si c’est plus ou moins heureux chez Cuaron, de renaissance dans Gravity, et de lâcher prise dans All is Lost . Il faut souhaiter que ce message soit clairement reçu par le public et l’industrie et que les mauvais présages des pythies restent virtuels.

Gravity
Alfonso Cuaron

All is Lost
J.C. Chandor
En salles