Wade Guyton : « L’imprimante réfléchit pour moi »
Wade Guyton : En utilisant très mal son PC, le New-Yorkais provoque des « accidents ».
Recyclez-vous ou volez-vous les images que vous utilisez ?
Wade Guyton : Je déchire simplement les pages de livres. Généralement, j’achète ces livres, donc on peut dire que j’achète ces images.
Vous posez parfois des formes géométriques dessus. Quelle valeur ont ces formes ?
Elles sont dessinées avec Microsoft Word, donc d’une certaine façon, il s’agit d’écriture. Mais comme ce sont aussi des formes dessinées, je les appelle dessins. J’oublie souvent d’où viennent les pages, et parfois j’oublie d’imprimer la bonne page pendant que je suis en train de lire mes mails. Il m’arrive aussi d’oublier d’enregistrer les fichiers, alors je suis obligé de refaire quand j’en veux un similaire – au moins, chaque dessin est unique.
Le photographe californien Elad Lassry dit qu’il y a quelque chose d’ironique à s’approprier des images contemporaines. Qu’en pensez-vous ?
Dans l’épisode « The Bubble » de la série « 30 Rock » [2009], Drew Baird [joué par Jon Hamm] dialogue avec sa petite amie Liz Lemon [Tina Fey] :
« — Drew : Je n’ai pas aimé être en dehors de la bulle, Liz. C’était très ironique.
— Liz : Non ce ne l’était pas, ce n’est pas comme ça qu’on utilise ce mot.
— Drew : Je veux utiliser ironique comme je l’entends. Je veux rester dans la bulle, Liz. »
Est-ce que vous traitez toutes les images de façon équitable et démocratique ?
J’essaie d’être juste, mais c’est difficile de nos jours. Utiliser une image, c’est d’abord la pointer du doigt, ensuite l’indexer. Tout cela se rapproche de cet index qui pointe le ciel, montrant un transcendant. Ça pourrait aussi bien être un doigt dans le cul.
Quelle est l’importance de la matérialité des images que vous utilisez vis-à-vis de leur contenu informatif ?
Selon la qualité du livre, la feuille absorbe plus ou moins l’encre. Et là où il y a déjà une image, l’encre agit très différemment aussi avec le blanc du papier et parfois l’information fait « saigner » l’encre.
Le collage est-il un médium sale, utilisant des déchets, des restes d’images ?
Tout à fait, et si le sol de la cuisine est sale, le collage le sera d’autant plus.
Coller, est-ce « penser avec ses mains » (d’après l’écrivain suisse Denis de Rougemont) ?
Pas faux : mes doigts font le travail et l’imprimante la réflexion.
Whitney Museum, New York
Jusqu’au 13 janvier
Exposition thématique autour du collage
Seuls quelques fragments de nous toucheront quelques fragments d’autrui
Galerie Thaddaeus Ropac, Paris
Jusqu’au 12 janvier