Des corps avec la nature : Ryan McGinley à la Galerie Perrotin
La galerie Perrotin ouvre ses portes au photographe new-yorkais Ryan McGinley, le bien nommé “fils de Warhol”. Une exposition qui tombe à pic pour prolonger le trop instantané Paris Photo.
Pour son premier passage en France, le photographe américain a développé Body loud, une série de vingt photos inédites qu’il tire de ses pérégrinations annuelles dans le fin fond des Etats-Unis. Depuis 2005, Ryan McGinley concocte chaque été un corpus qui immortalisent les corps nus de modèles non professionnels. Courant dans les champs de blés, s’accrochant aux branches ou se prélassant dans la boue, les jeunes gens se frottent avec un plaisir non camouflé aux forces de la nature. Les plus observateurs reconnaîtront la trace de patte de celui qui a signé la pochette du cinquième album au nom imprononçable de Sigur Rós.
Armé de son Leica, McGinley recrée des atmosphères qu’il tire de Days of Heaven de Terrence Malick (1978), d’Easy Rider de Dennis Hopper (1969) ou encore des ouvrages de ses mentors : Richard Avedon (The American West, 1979-1984) et Robert Frank (The Americans, 1958). Le résultat : un mélange de photographies de nus, de sports et de paysages.
Né dans le New Jersey en 1977, Ryan aiguise son oeil dès l’adolescence en filmant en boucle les figures de ses skateboarders d’amis avec un camescope Sony. Ses débuts dans la vidéo ne l’empêchent pas de devenir, à 25 ans, le plus jeune photographe à présenter une exposition personnelle au Whitney Museum of American Art avec The Kids Are Alright. Si ses images fixes débordent de mouvement, c’est parce qu’il perpétue son approche de vidéaste, répétant à l’infini les scènes qui défilent devant l’objectif. L’effet est admirablement contradictoire : une spontanéité travaillée aux lumières studio. Avec leur corps athlétiques ou relâchés, en suspension ou échoués, ses modèles sont mitraillés à leur insu, à ce qu’il paraît du moins. Rien ne sert d’être sincère pour atteindre l’inattendu.
La Galerie Perrotin a également convié Sophie Calle, une habituée des lieux, pour son exposition Dérobés qui regroupe deux séries (Tableaux dérobés et Que voyez vous ?) ainsi que l’œuvre Le Major Davel. Centrées sur la disparition, son thème de prédilection, ses productions rendent hommage à des tableaux volés ou simplement décrochés pour restauration, en donnant la parole à ceux qui les ont approchés : conservateurs, personnels d’entretien, gardiens…
Par Elsa Puangsudrac
Ryan McGinley – Body loud, jusqu’au 11 janvier
Sophie Calle – Dérobés, jusqu’au 11 janvier
Galerie Perrotin
76 rue de Turenne, Paris 3e