Pierre après pierre, Niney s’approche des étoiles.
Entré à la Comédie-Française en 2010, à 25 ans, Pierre Niney en est le plus jeune pensionnaire. En septembre, il y jouera Un chapeau de paille d’Italie d’après Labiche, parallèlement à la sortie au cinéma de Comme des frères (road movie à la française autour de l’absence d’une femme, Mélanie Thierry), troisième film d’Hugo Gélin, présenté à Cannes. Nominé au César du meilleur jeune espoir 2011 pour son rôle de provincial fauché un peu mytho dans J’aime regarder les filles de Frédéric Louf, ce brun au visage fin nous répond dans le bar du Gray d’Albion, hôtel cannois où tout le monde semble pris par le temps. Sauf Pierre, qui dépasse le planning et, gentleman, nous sert le thé.
A côté du cinéma et de tes projets perso – tu as écrit, mis en scène et joué dans Si près de Ceuta au Théâtre de Vanves, en février –, que prépares-tu à la rentrée au Français ?
Pierre Niney : On m’a confié le magnifique premier rôle d’Un chapeau de paille d’Italie [comédie d’Eugène Labiche, 1851]. Cette fois-ci, je suis un homme marié donc installé. Un défi pour moi qui cumule les rôles de jeune homme maladroit et fragile. Je suis un grand fan de Mathieu Amalric pour l’originalité qu’il a mis dans ses rôles, il a une « patte » humoristique. On a tendance à déprécier l’art du comique en France. J’aime Poelvoorde, qui est un génie au même titre que de Funès.
Paradoxe sur le comédien de Diderot est ton livre de chevet, pourquoi ?
Cet essai est un moment charnière dans le point de vue qu’on avait sur le théâtre en 1775. Il y a des thèmes abordés fondamentaux et des passages désuets proches du décorticage mathématique.

Pierre Niney par Anaïs Brebion interview standard

© Anaïs Brebion

Entre Brecht et , comment navigues-tu ? 
A vue ! Je n’ai pas de stratégie pour passer du contemporain au classique. Porté par mon instinct, j’essaie de suivre naturellement l’écriture de la pièce et la volonté du metteur en scène… Là, je commence le tournage d’un film où le réalisateur, David Moreau, nous permet d’improviser, ce qui est jouissif !
Dans J’aime regarder les filles, il y a de la maladresse dans ton jeu, dans Si près de Ceuta, une assurance troublante. Comment réalises-tu ces grands écarts ?
Le répertoire théâtral offre beaucoup de diversité, la question de l’âge est moins importante. Au cinéma, je cherche des problématiques qui sortent de cette image d’oiseau tombé du nid. Frédéric Louf, le réalisateur de J’aime regarder les filles, a vu de la fougue, en moi, du personnage manichéen, immature… ça tranche avec Maxime, celui de Comme des frères, immédiat, à la fois mature et candide, plus décidé dans ses choix et ses convictions.
Etoile montante, sens-tu une pression ?
Le plaisir plutôt que la pression ! Il m’arrive plein de choses positives, mais on ne sait jamais ce qui nous attend, alors je préfère m’amuser comme à mon premier cours de théâtre.

Comme des frères
D’Hugo Gélin

Un chapeau de paille d’Italie 
La Comédie-Française
Jusqu’au 7 janvier 2013

Entretien Bérengère Alfort dans Standard n°36, juillet 2012 Photo 1 Lisa Lesourd