Orelsan complètement grimé
Carte blanche musique
Gloire(s) et héritage du grime anglais, vite fait.
par Orelsan en janvier 2012 dans Standard n°34
Pour moi, la scène anglaise n’existait pas avant 2003, jusqu’à ce que je découvre le grime et Dizzee Rascal. Son premier album, Boy in da Corner, m’a fait péter les plombs. C’était exactement ce que j’essayais de faire avec un accent de malade et des instrus garage drum & bass bizarres que j’aimais bien parce que, moi aussi, j’ai grandi en écoutant autant d’électro (les Chemical Brothers, Prodigy) que de trip-hop (Tricky), du rock ou du métal (les Deftones, Limb Bizkit) – rien de trop lisse. Côté rap, j’ai d’abord été influencé par la scène américaine : Notorious BIG, Ludacris ou Jedi Mind Tricks. Pourtant, il y a encore neuf mois, je vivais à Caen, donc très proche de l’Angleterre.
Après Dizzee, je me suis branché sur Wiley, The Streets, puis Kano, devenu depuis l’un de mes rappeurs préférés. Dans ses clips, c’était jamais des boîtes de ouf avec des trucs fantastiques en marbre. Ça restait street, East London. Idem pour les paroles de The Streets : boire au bar, avoir de petites dettes… même par rapport aux meufs, ils jouaient pas les macs avec plein de bombasses autour d’eux. Sa chanson Geezers Need Excitement parlait du fait de grandir en province et s’ennuyer au point de se faire du mal sans raison, genre bastons de fin de soirée. Ça ressemblait vraiment à ce qu’on vivait, mes potes et moi, y compris pour les styles vestimentaires. Rien à voir avec l’hyperbole US.
London Calling
Le clip Upper Clapton Dance de Professor Green est sorti à peu près en même temps que celui de ma chanson No Life (2009) et les deux ont des similitudes : sample de musique classique, caméra sur pied très proche des visages. Ça m’a amusé, on sent que c’est dans l’air. Sur mon deuxième album, Mauvaise Idée ou Des trous dans la tête peuvent faire assez dubstep, avec leurs flows saccadés entre 140 bpm et 160 bpm. Et sur Finir mal, je fais du grime en fait.
Depuis, le genre a évolué, avec des types comme Skepta, Tinie Tempah, Tinchy Stryder, Example ou Giggs. Ça devient vraiment mainstream, même Snoop Dogg a rappé sur des instrus garage UK. Au final, ce style est super marqué 2003-2008, mais a beaucoup d’influence sur la musique actuelle. D’ailleurs, j’aimerais bien être mieux informé, connaître les ragots dans le milieu. Internet c’est bien, mais là j’ai envie d’aller à Londres pour m’imprégner de cette culture. Je ne l’ai fait qu’une fois, vite fait, il y a dix ans, loin du rap. Maintenant, j’ai des contacts. En plus, ça fait trop longtemps que je ne suis pas parti en vacances.
Après une tournée en France, Orelsan fête ses 30 ans avec deux Victoires de la musique et une mixtape avec son groupe Casseurs Flowters et un sample de Bonkers de Dizzee Rascal. Il sera au festival Fireworks du 13 au 24 février.