Rencontre-flash avec Agyness Deyn, designer-guest pour Dr. Martens.
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Elle a de grandes mains, de longs doigts, des cheveux un peu abîmés par douze ans de podiums et de décolorations – l’une de ses marques de fabrique. Nous voici dans un sous-sol, dans la ville de New Order, pour la présentation de la collection automne-hiver 2013 de Dr. Martens, dont plusieurs éléments sont designés pour la seconde fois par le model anglais, 30 ans, qui se verrait bien dans cinq ans continuer à faire ça – entre deux rôles au cinéma, après ses apparitions dans Le Choc des Titans et le remake UK de Pusher du Danois Winding Refn.

Sur les murs, on lit : « s’élever contre le conformisme », « défier les règles ». Ses créations (Docs d’écolière, tweed à tout crin, robes de grands-mères pour « fille tranquille dont la chambre est recouverte de posters des Smiths et des Who ») semblent bizarrement sages par rapport à la ligne de la collec’ orientée « révolte ». Pourtant, son héros s’appelle Joe Strummer. Mais Agy’ adore aussi The Voice et se dit « obsédée par le thé », pour justifier en riant les théières ornant le col de sa chemise.

La première fois que vous avez « défié les règles » ?
Agyness Deyn : [Silence, inspiration]. Eh bien, comme vous le savez, je suis originaire de la région [Littleborough, à une trentaine de kilomètres], et à 18 ans, j’ai déménagé pour Londres. C’était un gros truc à l’époque, je ne réalisais pas bien. Mais ma maman m’a beaucoup encouragé [regard plein de gratitude à sa mère qui suit la conversation sur le canapé], alors je suis parti explorer, puis j’ai trouvé un copain, on s’est mariés… Il fallait que je le fasse. J’étais en mission, en quelque sorte, avec mon meilleur ami, Henry [Holland, styliste].

En quoi est-ce anticonformiste d’emménager à Londres ?
J’avais mon look, qui n’était pas celui des autres mannequins. Je me suis accrochée, j’ai travaillé dur, pour montrer que je tenais à ce métier, que je n’abandonnerais pas si le succès retomberait. Il m’a fallu quatre ou cinq ans avant de devenir une star. Le travail finit par payer. Je n’arrête pas de briser les règles, ou alors j’en pose de nouvelles. Et le meilleur moyen de se rebeller contre la mode, c’est encore de ne lui accorder aucune attention. Quand j’ai annoncé que je voulais être actrice, on m’a dit : « Mais pourquoi ? » Mais parce qu’en termes de créativité, c’est un sommet ! Bien sûr, ce n’est pas prudent, mais la prudence, ce n’est pas pour moi.

Quelle est votre définition de l’intégrité ?
Rester honnête vis-à-vis de soi-même. Ne pas se compromettre. Savoir dire non. Ce matin. On m’a demandé si je pouvais bosser demain, pour refaire encore du bla-bla-bla, mais demain je suis off. Car j’ai besoin de ce jour de repos pour donner le meilleur le surlendemain. Il y a trois ans, j’aurais dit oui, parce que je voulais vraiment montrer de quoi j’étais capable – ce qui est une très bonne chose –, mais aujourd’hui, no way.

Votre héros ultime s’appelle Joe Strummer. Chanson préférée des Clash ?
White Riot. [Elle fredonne : « I wanna riot, a riot of my own… »]. J’ai tellement dansé dessus, ado, comme une malade… ça parle de se battre pour ce que vous croyez.

Si Dr. Martens était réellement un docteur, que guérirait-il ?
La peur. C’était des bottes militaires, au départ, celles que vous portez sur le champ de bataille…

Demain, à part la sieste ?
Je tourne dans un film, Electricity, basé sur le roman du même nom de Ray Robinson [2006]. Je dois jouer une épileptique qui part à la recherche de son frère disparu. Le livre est vraiment génial. Sinon, je lis peu, mais je m’y mets, en ce moment. Des classiques. Orgueil et préjugés par exemple.